Macrocosme et Microcosme [1]

Rudolf Steiner

Je voudrais vous parler aujourd’hui d’une vérité capitale de la science ésotérique, le rapport qui existe entre le macrocosme et le microcosme. Il y a ainsi, dans la science ésotérique, un certain nombre de thèmes importants qu’on retrouve dans tout l’ésotérisme comme des leitmotivs, des thèmes conducteurs. Tel est celui du rythme des nombres ; le macrocosme et le microcosme en est un autre. Le mystère du nombre s’exprime en cela que certains phénomènes s’enchaînent de telles manières qu’on peut toujours considérer la septième répétition comme un terme, et la huitième comme le début d’une nouvelle série. Nous trouvons dans le monde physique un exemple de ce fait dans le rapport de l’octave à la tonique.

Le rapport qui existe entre le macrocosme et le microcosme est plus important encore. Nous en trouvons une image sensible à chaque pas. Observons par exemple la relation qui unit la plante à la graine. La plante peut être considérée comme un macrocosme par rapport à la graine qui est, elle, un microcosme. Dans la graine, les forces sont, en une certaine manière, ramassées tout d’abord sur un seul point ; elles se répandent ensuite dans toute la plante. Le même rapport existe entre le développement d’un individu et celui du peuple auquel il appartient.

Mais là où cette relation nous apparaît sous son jour le plus important, c’est entre l’homme incarné dans un corps physique, d’une part, et l’univers d’autre part.

Dans son être sensible, l’homme possède, comprimées en lui, toutes les forces de l’univers, comme la plante tout entière est concentrée dans la graine.

Tant qu’il vit sur la Terre, l’homme ne se connaît lui-même que sous cet aspect comprimé du microcosme. Mais il ne vit pas seulement dans le monde sensible ; il a aussi une existence qui se répand dans l’univers. Lorsqu’il tombe dans le sommeil, la conscience cesse pour lui, les sens ne lui parlent plus. Une science extérieure s’efforcerait en vain d’affirmer qu’en l’homme endormi se trouvent les mêmes éléments psychiques que dans son état de veille. Il est inadmissible que la vie psychique soit purement et simplement anéantie pendant le sommeil et qu’au réveil elle sorte du néant. La science extérieure devra bientôt admettre que les faits matériels sont aussi incapables d’expliquer la vie psychique que les lois de l’oxygène d’expliquer les poumons. Les poumons ne se comprennent que dans leur fonctionnement organique. De même la vie consciente que nous aspirons au réveil et expirons en nous endormant doit être comprise dans son fonctionnement interne. Pour l’occultisme, s’endormir, s’éveiller, ce sont les battements d’un rythme ; chaque matin, l’homme aspire son être spirituel, son âme ; il l’expire en s’endormant. Cet esprit, cette âme, qui sont pour nous ce qu’est l’air pour le souffle de nos poumons, où sont-ils quand l’homme dort ? La partie spirituelle de l’homme, ainsi que nous l’enseigne l’anthroposophie, est environnée par l’atmosphère du monde spirituel, de même que notre corps baigne dans l’atmosphère physique de l’air, avec la seule différence que l’air physique ne forme qu’une couche atmosphérique de quelques kilomètres, alors que l’autre emplit tout l’univers.

Examinons la quantité d’air que l’homme aspire dans son corps en fonction de ce qui se passe autour de lui. La même quantité qu’absorbent les poumons pendant l’inspiration est rejetée ensuite dans l’atmosphère. Si bien qu’avant l’expiration elle est dans le microcosme, après l’expiration dans le macrocosme. De même la vie de notre âme et de notre esprit est contenue à l’intérieur de notre corps entre l’éveil et le début du sommeil et s’exhale dans le macrocosme entre le moment de l’endormissement et l’éveil.

La science physique enseigne l’existence de l’atmosphère physique ; la science spirituelle décrit l’univers spirituel où vivent notre esprit et notre âme pendant le sommeil. Mais si les méthodes de la science physique sont bien connues, il n’en est pas de même à l’égard de la science spirituelle qui possède pourtant, elle aussi, ses méthodes d’investigation et de connaissance. Au cours des âges, ces méthodes ont toujours reçu le nom d’ initiation . Le but de l’initiation est de nous apprendre à connaître la vie de l’univers spirituel, du macrocosme, alors que l’expérience journalière ne nous fait comprendre la vie de notre âme que sous l’aspect du microcosme.

La science, qui a pour méthode l’initiation, acquiert une importance toute spéciale du fait qu’elle nous familiarise avec un monde où nous pénétrons nécessairement après la mort, c’est-à-dire après l’abandon définitif du corps.

La méthode de l’initiation nous enseigne comment agir sur ce plan de l’univers spirituel, comment le percevoir et en avoir conscience. Elle nous indique pour cela des exercices intérieurs. Nous devons tout d’abord nous efforcer de libérer de leurs attaches corporelles les activités de l’âme. Trois forces essentielles de l’âme sont étroitement liées au corps par la vie courante ; l’initiation doit les en délier.

La première est la force de la pensée . Nous l’employons habituellement à construire des idées, à nous former des représentations sur les choses qui nous entourent. Tâchons de pénétrer dans la nature de cette force de pensée. Que se passe-t-il en nous quand nous pensons ? La science physique a déjà bien établi le fait : chaque fois que nous saisissons une idée qui se rapporte à un objet physique, il se passe dans notre cerveau un phénomène de destruction ; nous détruisons la substance cérébrale ; la fatigue qui en résulte nous le prouve suffisamment. Ce que la pensée journalière a détruit, le sommeil doit le réparer. Or, par la méthode de l’initiation, nous parvenons à un état où la force de la pensée se libère du cerveau physique. La pensée se délie de son instrument matériel. Il n’y a plus alors de destruction.

Nous parvenons à cette libération de la pensée au moyen de la méditation , de la concentration , de la contemplation .

Ce sont des exercices qui impriment à l’âme une orientation absolument différente de son cours ordinaire. Pour nous faire comprendre, donnons un exemple précis. En général, les représentations que nous avons, tout ce qui remplit notre âme, se prête mal à évoquer en nous l’état méditatif ; il faut recourir à d’autres images. Représentez-vous par exemple que vous ayez en face de vous deux verres, dont l’un est vide et l’autre à moitié rempli. Or, voici qu’on verse de l’eau du verre à demi-plein dans celui qui est vide ; et représentez-vous maintenant que cependant le verre qui se vide devienne de plus en plus plein. Pour l’effet matériel, c’est un non-sens, une absurdité ; cependant la représentation sur laquelle nous voulons méditer ainsi n’a pas à être réelle, mais à nous donner une représentation qui ne vienne uniquement que de notre âme. C’est précisément parce que cette image ne contient rien de réel, rien de déjà vu dans le monde physique, qu’elle détourne notre esprit de la réalité sensible. Elle peut être un symbole ; par exemple, elle exprime ce fait intérieur qu’est ce mystère de l’amour. Il en est de ce mystère de l’amour comme du verre à demi-rempli qui se déverse dans le verre vide et par là se remplit encore davantage. L’âme n’est pas épuisée, mais comblée dans la mesure où elle donne. Tel est le sens que peut avoir ce symbole.

Quand nous méditons sur une image de ce genre et concentrons sur elle toutes les forces de notre âme, nous devons oublier tout le reste, nous oublier nous-mêmes. Le courant ordinaire de notre âme est dirigé dans ce sens nouveau un long moment. Il ne suffit pas de faire cet exercice une ou plusieurs fois ; il faut toujours le renouveler. On sentira en soi-même quelle transformation il opère dans notre vie intérieure. Nous remarquerons bientôt qu’il se développe ainsi en nous une force de pensée qui ne détruit pas le cerveau. La méditation qui est ainsi faite n’entraîne aucune fatigue et ne détruit pas la matière cérébrale.

Les débutants ont parfois une impression toute contraire, car la méditation les porte au sommeil. Mais cela vient de ce que, au début, ils dépendent encore du monde extérieur, tant que leur pensée n’est pas libérée du cerveau. Elle n’en est détachée que si, à la suite d’efforts répétés, nous parvenons à méditer sans fatigue. C’est alors que peu à peu notre vie se transforme. Alors qu’auparavant, pendant le sommeil, nous étions hors de notre corps inconsciemment, nous en prenons maintenant conscience. Alors que dans la vie habituelle nous sentions notre Moi comme enfermé en nous-mêmes, nous nous sentons, par la méditation, filtrer à travers notre corps. Celui-ci devient un objet que nous regardons comme du dehors. Nous arrivons ainsi à sentir quelle force magnétique nous enchaîne à lui. Et nous reconnaissons que ce sont les mêmes forces qui, chaque matin, nous ramènent vers ce corps physique où nous allons pénétrer à nouveau. Les forces qui nous attirent ainsi sont les mêmes, nous le voyons maintenant, que celles qui ont présidé à notre naissance. Nous les avons puisées dans le monde spirituel ; ce sont les courants que nous avons suivis pour aller vers un nouveau corps. Nous voyons pourquoi elles nous ont attirés vers l’enchaînement des générations, vers nos parents.

Quand notre âme a conquis de cette manière la faculté de passer du microcosme au macrocosme, de contempler son corps comme du dehors, une expérience spirituelle s’offre à elle à ce moment. L’âme qui a pu prendre en elle-même une certaine fermeté, une certaine indépendance extérieure par rapport au corps, peut comprendre dès lors ce qui s’est passé sur Terre lorsque le Christ y a vécu dans un corps physique. Et c’est ce qu’on peut appeler la première rencontre dans le macrocosme avec l’impulsion du Christ.

Examinons maintenant la seconde force de l’initiation dont nous possédons le germe en nous. De même que nous pouvons libérer la pensée, nous pouvons libérer également la force que nous employons pour le langage . On a cru pendant longtemps, dans la science extérieure, que la faculté du langage s’élaborait dans les circonvolutions cérébrales. Mais ce n’est pas dans ce sens qu’est le rapport. L’organe de Broca ne forme pas le langage ; il a été formé par lui.

La fonction de la pensée détruit la matière cérébrale ; celle du langage construit l’organe de Broca. C’est cette force que nous pouvons détacher de son support physique quand nous cultivons tout particulièrement un sentiment puissant au cours de notre méditation. Si je médite sur cette phrase : «  Dans la Lumière rayonne la Sagesse  », ces mots ne reflètent non plus aucune réalité extérieure, mais ils ont une signification profonde. Si nous en faisons un sentiment intense, celui-ci par exemple : je veux vivre dans cette lumière qui rayonne de sagesse, nous sentons alors comment il est possible de saisir cette force qui se déverse en général tout entière dans les mots, de la retenir, de la garder en notre âme. C’est en cela que consiste le «  silence d’or  », en ce que la force qui crée le mot rayonne en notre âme.

Cet exercice nous en donne la maîtrise. Le précédent nous avait enseigné la maîtrise de la pensée. A cette maîtrise était liée celle de l’espace ; le second exercice nous rend maîtres du temps. Le déroulement de nos souvenirs s’étend alors jusqu’à la naissance et peut même remonter au-delà de cette frontière. C’est la voie sur laquelle nous pouvons nous avancer pour retrouver l’existence qui s’est écoulée avant notre naissance et remonter dans le passé de l’humanité. Ce que nous contemplons alors, c’est la puissance qui dirige l’évolution de l’histoire humaine. La base spirituelle de toute vie terrestre devient l’objet de notre connaissance quand nous avons édifié en notre âme la force du verbe, la force du mot inexprimé et métamorphosé.

Il se passe à nouveau ici un événement spirituel qui nous met en rapport avec le Christ. Nous sommes arrivés au point d’intersection entre la ligne de l’humanité et la ligne du Christ, au moment où il s’est incarné. C’est la force originelle du Christ que nous contemplons alors. Et cette expérience projette une lumière spéciale sur les premiers versets de l’évangile selon Jean.

En libérant notre pensée, nous étions unis au Christ tel qu’il était sur Terre. La spiritualisation du verbe nous fait comprendre le mystère du Golgotha.

Une troisième force encore peut acquérir son indépendance au moyen de la méditation. Non seulement, le lien doit être dénoué avec le cerveau, avec le larynx, mais aussi avec la circulation du sang et le coeur . Toute une force de notre âme est intimement liée à la circulation du sang et par elle au coeur. Nous pouvons nous en faire une faible idée lorsque nous voyons quelqu’un rougir ou pâlir. L’action de cette force peut devenir purement psychique et peut être comme soustraite à son correspondant physique, rendue indépendante des pulsations du sang. C’est ce qui arrive dans les méditations où la volonté entre en jeu. Reprenons la phrase indiquée précédemment : «  Dans la Lumière rayonne la Sagesse ». Mais ayons cette fois la ferme résolution d’y unir notre volonté, de telle sorte que, de toute notre énergie, nous accompagnions cette sagesse rayonnante dans l’évolution de l’humanité.

Quand nous arrivons ainsi à introduire la volonté dans la méditation, nous élevons ces forces de la vie volontaire sur le strict plan de l’âme. Si l’on peut extraire du sang ces forces (en vérité, on ne les extrait jamais complètement) et les diriger, elles deviennent en nous comme un organe de clairvoyance par lequel nous nous élevons au-dessus de la Terre. Le devenir de la Terre s’explique à nous ; elle nous apparaît comme une planète qui a passé déjà par des métamorphoses, des sortes d’incarnations, et qui s’incarne sous cette forme terrestre, cependant que nous avons nous-mêmes la forme humaine. Ainsi, nous gagnons peu à peu les états de conscience du monde spirituel, du macrocosme.

On ressent alors comment la vie qui s’écoule sur Terre entre la naissance et la mort forme un contraste avec l’existence qui se déploie dans le monde spirituel, entre la mort et une nouvelle naissance. Ce que l’homme a vécu après la mort, ou si l’on veut avant de naître, libéré de son corps, c’est ce qu’expérimente alors l’initié.

Quand nous vivons dans notre corps, dans le microcosme, les perceptions nous viennent au moyen des organes physiques des sens. Après la mort, lorsque nous ne sommes plus atteints par les perceptions sensibles, des rapports nouveaux doivent s’établir entre l’âme et le milieu où elle vit. Il faut déjà avoir trouvé sur Terre comme le fait l’initié, le moyen de passer du microcosme au macrocosme pour établir consciemment cette relation de notre âme avec le monde spirituel.

Le travail que nous faisons sur nous-mêmes et qui nous fait déjà vivre pendant la méditation au sein de ces conditions spirituelles, nous rapproche de ceux qui ont déjà franchi le seuil de la mort. Il est impossible de s’entretenir avec les morts au moyen du langage humain habituel. Mais, quand nous avons libéré dans l’âme cette force du langage, ce qui se découvre alors à nous, c’est la manière dont nous sommes liés aux morts. Si nous libérons la force de la pensée, nous arrivons à nous entretenir avec ceux qui se trouvent entre la mort et une nouvelle naissance. Pour en citer un exemple, on peut prendre celui d’un homme qui sur Terre fut excellent, mais seulement au sens matériel et à l’égard des siens ; toutefois il n’avait en son âme aucun idéalisme, aucune spiritualité. Le clairvoyant qui entra en rapports avec cet homme, après que celui-ci eût franchi le seuil de la mort, retira de lui l’impression suivante : « J’ai vécu avec ma famille sur Terre, avec les miens ; ils étaient toute ma lumière. Ils vivent actuellement, je le sais, mais je ne puis les voir que jusqu’au moment où j’ai quitté la Terre. Depuis lors, je ne peux établir aucun rapport avec eux. » Et le clairvoyant put continuer de suivre ce qui se passa par la suite. L’influence de cet homme avait grandement agi sur sa femme pendant qu’il vivait et continuait d’agir après sa mort ; l’homme pouvait voir cet effet, comme on voit non un être vivant, mais un reflet dans un miroir.

Ainsi peut apparaître après la mort tout ce qui est de nature spirituelle. Nous voyons sur Terre, dans notre corps physique, l’existence corporelle ; après la mort, c’est tout ce qui est fait d’âme et d’esprit que nous pouvons percevoir.

Il y a donc un rapport possible entre ceux qu’on appelle les morts et les vivants et ce rapport s’établit si les vivants s’élèvent à une activité spirituelle. En cela consiste le bienfait que nous pouvons apporter aux morts. Nous pouvons encore donner quelque chose à un être qui a franchi les portes de la mort, surtout si un lien nous unit à lui. Une des façons de lui donner est de se représenter par exemple qu’il est devant nous, de lui adresser nos pensées et de lui lire ce qui peut être un aliment pour son âme. Mais nous ne pouvons nous faire percevoir que si notre âme elle-même porte en elle la force spirituelle qui rend ces idées, ces pensées perceptibles pour lui. L’une des tâches de l’anthroposophie ne peut être vraiment comprise que si l’on voit en elle ce qui nous permet intérieurement de combler l’abîme qui nous sépare des morts. Si même un être était pendant sa vie entièrement opposé à un enseignement comme celui de l’anthroposophie, il peut recevoir après sa mort un véritable bienfait de ce genre de lecture. Car au fond, dans notre vie intérieure, il faut bien distinguer deux choses : la surface et le fond. Nous n’avons conscience que de la surface, comme nous ne voyons que les vagues de la mer, mais toute la réalité des profondeurs nous échappe. S’opposer par sa conscience à un enseignement spirituel, cela peut être purement un phénomène de surface ; dans la réalité, l’âme peut nourrir dans ses profondeurs une profonde aspiration. Notre conscience de surface ne veut pas s’en rendre compte et préfère s’étourdir pour oublier ce qui se passe au fond. Mais lorsque cette âme franchit le seuil de la mort, tout se transforme. Elle a précisément soif d’accomplir les désirs inconscients dont sa vie terrestre l’a détournée. C’est pourquoi elle peut recevoir un véritable bienfait d’une lecture spirituelle, qui vient alors lui apporter ce dont elle a le plus besoin. Celui qui fait cette lecture devient graduellement conscient du lien qui s’établit entre lui et les morts. Mais, avant même d’avoir ce sentiment, s’il lit ainsi, il ne risque rien que de n’être pas entendu.

Nous voyons donc qu’une compréhension vivante du rapport qui existe entre macrocosme et microcosme, vie physique et vie dans le monde spirituel, nous aide à établir un lien avec les soi-disant morts.

Le lien peut encore s’établir d’une autre façon. Quand le clairvoyant observe, par exemple, un homme qui dort, il constate la différence qui existe entre les âmes, entre celles qui franchissent les portes du sommeil sans avoir jamais dans la journée nourri la moindre pensée spirituelle, ou celles qui à l’état de veille accueillent en elles ces pensées. Or, pendant le sommeil, nos âmes s’offrent aux morts comme un champ étendu devant eux et les pensées spirituelles sont comme des semences dans ce champ. Lorsqu’en nous endormant, nous n’emportons pas dans notre âme de ces pensées, nous retirons aux morts leur nourriture. En leur lisant, nous leur donnons une impulsion spirituelle ; les idées que nous emportons avec nous dans le sommeil les nourrissent.

Ainsi, tout ce que l’homme édifie en son âme construit le pont qui relie le microcosme au macrocosme. Une partie grandissante de notre être intérieur s’affranchit du périssable ; l’immortalité devient une expérience vécue. De même que la graine est la garantie d’une prochaine graine, la force spirituelle qui s’affirme en nous est la garantie d’un retour à la vie. Nous ne comprenons plus seulement sous une forme abstraite l’immortalité, nous la réalisons en nous. La force qui parcourt notre âme est celle-là même qui nous fera franchir le seuil de la mort et s’épanouira au-delà de ce seuil.

Quand nous avons fait de cette vérité la sève intérieure qui parcourt tout notre être spirituel, le rapport avec l’univers, le macrocosme, est établi dès notre vie physique dans le monde physique.


Notes

[^ 1] 1 Cette conférence a été publiée la première fois dans la revue La Science Spirituelle 14ième année, numéro double 7-8 de mai-juin 1935. Conférence faite à Paris le 9 mai 1913 – in GA 150 : Die Welt des Geistes und ihr Hereinragen in das physische Dasein. Das Einwirken der Toten in die Welt der Lebenden. Zehn Vorträge zwischen dem 12. Jan. und 23 Dez. 1913 in verschiendenen Städten.



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